Crise dans un collège de l’Allier : Quelles leçons ?

A la rentrée des vacances de Pâques, M. le Principal du collège de Dompierre est parti, et il n’est pas prévu qu’il revienne. C’est là l’épilogue d’une longue épreuve sur laquelle le SNES-FSU estime nécessaire de tirer le bilan, pour les collègues et envers l’administration, notamment (mais pas seulement) dans le cadre de la Formation Santé et Sécurité au Travail (STT).

Que faire quand une direction d’établissement, de toute évidence, dysfonctionne ? C’est la question qui s’est posée dans ce collège tout au long de l’année 2021-2022 déjà. En juin 2022, les collègues, soutenus, conseillés, et accompagnés au Rectorat, par le SNES-FSU, ont observé une journée de grève. Au Rectorat, l’oreille a été à la fois compréhensive mais décidée à tout faire pour faire durer et attendre. De toute évidence, il était misé sur la patience des personnels, enseignants et non enseignants, voire sur leur endurance et leur résilience.

De très nombreuses alertes

Cela a donc été long, très long, mais avec une tension progressivement croissante. Une visite et d’amples auditions de l’Inspection Vie Scolaire ont été suivis de … strictement rien. A l’automne 2023, à la demande des représentants syndicaux en Formation SST départementale, celle-ci s’est rendue en visite au collège sur une journée. La situation constatée était plus grave qu’initialement envisagée, la souffrance de plusieurs collègues, notamment de collègues femmes, était manifeste, et, à notre initiative, les préconisations adoptées, pour la partie engageant les représentants des personnels, mettait les pieds dans le plat : à un moment donné, l’administration doit prendre ses responsabilité et déplacer le facteur principal d’une situation non seulement bloquée, mais que nous avions alors signalée comme dangereuse et susceptible de déraper. Il ne s’agissait pas d’« avoir la peau » de qui que ce soit mais bien d’éviter une aggravation, y compris dans l’intérêt du premier intéressé d’ailleurs.

Soutenir les collègues

Cette situation a impliqué, pendant plusieurs mois, un suivi assidu aux côtés de plusieurs collègues pour lesquels le SNES-FSU, et le SNEP-FSU envers les collègues d’EPS, ont obtenu les temps partiels apparemment menacés dont ils demandaient le renouvellement, le droit au logement de fonction normalement accordé le reste du temps, des relèvements d’avis de rendez-vous de carrière, et bien entendu le suivi et le conseil concernant les nombreuses fiches SST nécessitées par la situation et leur examen dans les groupes de travail de la formation SST, bref une « guérilla » épuisante pour tout le monde. Nous avons appuyé par des préavis les velléités des collègues de faire grève à la rentrée de janvier, finalement non mises en œuvre par eux à cette date, ce qui a permis des entretiens – corrects et francs – avec Madame la Dasen de l’Allier et le Secrétaire général et avec la DRH académique, dans lesquels nous avons dit qu’il fallait réagir avant un dérapage.

Une situation intenable

Le dérapage s’est amorcé début avril avec un incident suivi du burn out d’une collègue. Les personnels ont alors décidé de faire un « éclat », sous la forme d’une grève et d’un rassemblement le mercredi matin 10 avril, avec le soutien du SGEN-CFDT et du SNES-FSU. Juste avant, le SNES-FSU a contacté Inspection et DRH en leur disant la nécessité de déplacer rapidement le Principal dans son propre intérêt, et d’éviter de prolonger un face-à-face délétère. Le journal La Montagne a consacré un article à ces faits le 11. La nouvelle est arrivée au collège du non-retour du Principal à la rentrée de Pâques le lendemain. Un article est encore paru dans la Semaine de l’Allier quelques jours plus tard.

Le SNES-FSU a évité, tout au long de ce mauvais « feuilleton », de se mettre en avant ostensiblement, et même appelé à prendre des précautions, sur un tel sujet, avec les médias, tout en ayant cherché systématiquement la solution qui s’imposait : dans le respect des statuts de chacun, et des instances saisies, que l’administration fasse le choix qui s’imposait au lieu de miser sur la patience éternelle des collègues. Elle n’était finalement pas éternelle, et a raccourci de deux mois cette longue mise à l’épreuve, car le départ du Principal au plus tard en septembre était certain.

Notre analyse

Avant tout, il convient de saluer l’endurance et le professionnalisme des collègues, professeurs, administratifs, agents territoriaux, AED et AESH, qui ont maintenu pendant 3 ans le fonctionnement et essayé d’assurer l’offre pédagogique de l’établissement, et qui ont à cœur de la faire repartir d’un bon pied.

Mais il faut tirer les leçons de cette histoire. Car, disons le explicitement, Dompierre a été un cas grave, mais pas un cas isolé. Le management et le rôle dévolu aux chefs d’établissements, notamment dans l’application aveugle de « réformes » qui vont à l’encontre des principes du service public et de l’éthique professionnelle de beaucoup d’entre eux comme de tous les personnels, nourrissent de telles situations et créent le terrain des dérapages. Cette contradiction politique embarrasse-t-elle notre administration ? C’est bien possible …

Le respect des statuts et des personnes est fondamental, mais cela vaut pour tout le monde. Nous souhaitons avoir, dans le cadre des instances SST notamment, des échanges permettant à l’avenir une plus grande confiance dans l’expertise des représentants du personnel qui ne s’amusent pas à dénoncer qui que ce soit mais essaient d’alerter sur les vrais dangers, et surtout l’indispensable plus grande promptitude dans la gestion de ces situations. Ce travail de terrain est pour nous partie intégrante de l’action pour la défense du service public, de la fonction publique et de l’école laïque.